La génération Z : sales gosses ou moteurs de transformation ?
La génération Z regroupe tous les actifs nés après 1996, c’est-à-dire ayant maximum 23 ans et débarquant donc en nombre sur le marché du travail. Comme sa grande sœur la génération Y ou ‘millenials’, ce nouveau cru inquiète autant qu’il suscite nombre d’analyses et d’études en tout genre. Ramassis de fainéants pour les uns, irrespectueux de la hiérarchie pour les autres, cette génération déchaîne les passions et déstabilise ses aînés. Alors, n’y-a-t-il que les fabricants de babyfoots pour se réjouir de l’arrivée de cette génération dans les entreprises ? Qu’attendre d’eux ? Et comment les intégrer ? Happy to meet you vous répond.
Génération Z = gros boulets ?
À écouter les dirigeants, souvent issus de la génération boomers ou X, les jeunes d’aujourd’hui sont ingérables. Eric, à la tête d’une société en Bretagne témoigne : « La nouvelle génération, très peu pour moi. Ils demandent des conditions pas toujours simples d’accès pour une entreprise traditionnelle comme nous. Et une fois que vous leur avez tout donné (aménagement du temps de travail, télétravail, escape games,…), ils vous plantent. Chez nous, c’est au sein de cette génération là que le taux de turn over est le plus fort. » Mais quelle est donc cette génération de sales gosses pourris gâtés qui ne vivent que pour la free food et qui claquent de la dém comme on respire ?
« La nouvelle génération est épouvantable. J’aimerais tellement en faire partie ! » Oscar Wilde
Portrait robot
Afin de bien comprendre de quoi on parle, essayons de décrypter les grands traits de cette génération… La génération Z – de 96 à 2012 – est née et a grandi en même temps que Facebook, Google et autre Instagram.
Ils sont ‘Digital natives’
C’est la génération du fast-checking et des tutos. Trouver une information ou acquérir un savoir-faire technique en un minimum de temps font partie des forces de cette génération de l’immédiateté. À bien y réfléchir, à l’heure où les entreprises se transforment, un talent sachant chercher une information et s’approprier un savoir-faire en moins de deux peut s’avérer bien utile.
Ils rejettent les conventions établies
Mais que reproche-t-on au fond à ces nouveaux actifs ? Peut-être le rejet de ce que les générations précédentes acceptaient sans ménagement : le dépassement du temps de travail, la rédaction de compte-rendu qui tombent dans l’oubli aussitôt rédigés, l’obligation de venir au travail même quand internet ne fonctionne plus ou qu’il y fait une chaleur insupportable… Et si finalement, ils étaient tout simplement plus clairvoyants que leurs aînés ?
Une génération pleine de contradictions
Engagés pour le climat mais amateurs de city breaks, fervents défenseurs de l’égalité homme-femme mais férus de télé-réalité, friands de produits locaux mais consommateurs de quinoa et d’avocat venus d’Amérique du sud, dégainant du selfie tout en dénonçant les campagnes publicitaires ayant un recours abusif à photoshop, cette génération n’est pas à une contradiction près. La génération Z est autrement appelée génération ‘Me‘.
Une génération réputée in-ma-na-geable ?
Autres éléments déstabilisants : l’argent et le pouvoir. L’argent pour cette génération, c’est important oui… Mais pas autant que la qualité de vie au travail. Selon une étude Yatedo, 61% des jeunes de la génération Z estiment que la qualité de vie au travail est plus importante que le salaire. Et le pouvoir ? Ils sont 66% à déclarer ne pas être séduits à l’idée de devenir managers (étude Cegos). Mais alors, comment manager ces jeunes qui ne courent ni après l’argent, ni après le pouvoir ? Amis managers, vous êtes attendus au tournant ! Les « Z » attendent de vous la transmission des compétences (37%), une ambiance conviviale (44%)… et revendiquent le droit à l’erreur.
Pas d‘amour, que des preuves d’amour !
Pour réussir à séduire un talent issu de la génération Z, il faudra déjà pouvoir lui garantir de la stabilité via la mise en place d’un CDI. Selon une étude du cabinet Mazars et de l’institut de sondage OpinionWay, menée auprès de 1.019 jeunes âgés de 15 à 25 ans -et dont 29 % sont déjà sur le marché du travail- publiée le 30 janvier dernier, 86% rêvent d’un CDI et 80% d’un temps plein. Redoutant plus que tous les démarches et les lourdeurs administratives, les Z comme leurs aînés connaissent l’importance du CDI dans l’obtention par exemple d’un crédit immobilier.
Aspirant à toujours plus de liberté
Si les jeunes rêvent d’un CDI, ils ne conçoivent pas l’organisation du travail comme les ‘anciennes‘ générations. Capables de cumuler plusieurs jobs en même temps, ces jeunes n’hésitent pas à mener des missions en parallèle, en freelancing via le statut d’auto-entrepreneur notamment. L’organisation du travail au quotidien est aussi différente et le présentéisme –tant usité par les générations passées- a du souci à se faire. A quoi bon bosser de 9h à 12h si l’inspiration est nocturne ? Pour les Z, c’est l’accomplissement des missions qui prime au détriment d’une logique horaire parfois perçue comme superflue ou dépassée.
Attachée à l’équipe et… au bureau
Toujours dans la contradiction, les jeunes ont soif d’indépendance mais ils ont en même temps un grand besoin d’attention. Pour eux, l’humain est crucial. Ils seront attentifs à l’environnement de travail et scanneront les softskills de chaque membre avant de s’engager. Et contrairement aux idées reçues, les espaces de bureau ont encore de beaux jours devant eux. En effet, toujours selon l’étude du cabinet Mazars et de l’institut de sondage OpinionWay, 79% des « Z » estiment qu’il est important qu’une entreprise dispose d’un lieu de travail physique.
Phénomène de dispersion
Évidemment, tous ces traits de caractère établis en carnets de tendance par les plus grands cabinets d’étude peuvent vous apparaître bien caricaturaux et vous aurez raison ! Les études, qui s’appuient sur des datas de masse et sur de l’observation subjective, ne font pas de cas des spécificités individuelles.
Cependant, à la manière d’une mode ou d’une tendance, l’arrivée de ces générations dans les entreprises entraine un effet de norme et contamine l’ensemble des actifs. Et c’est de cette façon que le collaborateur et le candidat d’aujourd’hui, Z ou non, porte en lui des stigmates de cette nouvelle génération. On voit donc apparaitre – et pas seulement du côté des jeunes – l’émergence de tendances au vocabulaire fleuri dont nos amis RH se passeraient bien ! Par ici, le salarié boomerang – quittant sa boîte pour en rejoindre une autre, et qui fait machine arrière, pendant sa période d’essai tant qu’à faire ! Coucou toi, celui que l’on appelle le « no show » qui après avoir passé brillamment les entretiens et avoir validé ton arrivée, ne te pointe tout simplement jamais dans l’entreprise. Ahhh, cœur avec les doigts ! Cœur avec les doigts à toi qui, en poste, part un soir en disant à demain… Et ne revient jamais. L’abandon de poste a en effet le vent en poupe. Mais pas seulement auprès des jeunes.
Boomers vs Z
Et si finalement, le problème ne venait pas des Z mais d’un manque de communication intergénérationnelle ? Parce qu’à y regarder de plus près, les générations boomers, X et Y n’ont pas non plus de quoi fanfaronner. Allez, petit portait de famille !
- Les boomers : ils ont entre 50 et 75 ans. Chaque année depuis 2006, ils sont environ 700 000 à partir en retraite et constituent alors, ce que les marketeux qualifient, avec toute la poésie qui les caractérisent, de silver economy. Souvent dépeints comme ambitieux et respectueux de l’autorité, ils ont grandi dans une société plébiscitant les longues carrières. Ces grands fidèles ont vu sur le tard l’arrivée des nouvelles technologies. Un bémol, ces grands travailleurs seraient les champions de la rétention d’information. Peut-être là un premier point d’accroche avec nos Z si demandeurs de transparence.
- Les X (1961 à 1979) : connue pour être plus pessimiste que sa grande sœur ‘boomers’, la génération X a vécu la fin de l’âge d’or avec l’arrivée du Sida, la catastrophe de Tchernobyl ou encore le début du chômage. Aussi loyaux que leurs aînés, les X sont reconnus pour leur capacité à organiser et à innover. Mais comme pour les boomers, cette génération reste encore souvent techno-exclue.
- Les Y (1980 à 1995) : autrement appelés les Millenials, ils ont vu Internet débarquer alors qu’ils étaient encore jeunes et ont dû s’adapter pour avancer, preuve de leur agilité. Génération d’entrepreneurs dans l’âme, les « Y » se caractérisent par leur autonomie. Cette génération se démarque cependant des précédentes par son rapport détaché à la hiérarchie et par sa volonté d’équilibre entre ‘vie pro et vie perso’.
Finalement, tout cela ressemblerait plutôt bien à un portrait de famille, avec des reliefs, de la couleur, des différences et des complémentarités. Les anciennes générations devront naturellement faire la place à cette nouvelle, car elle est sans nul doute porteuse d’une capacité à transformer sans égal. Et cela tombe bien à l’heure où les entreprises sont appelées à se transformer structurellement, numériquement et humainement, vous ne croyez pas ? Enfin, pour attirer et fidéliser les « Z », les entreprises devront leur donner des signes de stabilité et leur faire de la place. Et point non négligeable, elles devront être prêtes à sortir de leur zone de confort, pour se laisser évoluer.